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2 yr. ago
  • Johanna Barasz : « La crise de recrutement des enseignants est désormais structurelle, et on n’entrevoit pas de perspective de résolution mécanique »

    Alors que les concours sont une fois encore déficitaires, Johanna Barasz, autrice d’une enquête sur l’attractivité du métier d’enseignant pour le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan, décrypte les ressorts d’une crise du recrutement, mais aussi de la fidélisation des enseignants.

    Le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan a publié, le 18 juin, une étude intitulée « Enseigner : une vocation à reconstruire, un équilibre à restaurer ». L’autrice de l’analyse, Johanna Barasz, expose les principaux enseignements de cette enquête quantitative et qualitative sur les singularités et les ressorts d’une crise du recrutement plus inquiétante que toutes celles que l’éducation nationale a connues.

    L’éducation nationale a déjà connu des difficultés de recrutement par le passé. Qu’est-ce qui distingue la crise actuelle des précédentes ?

    L’éducation nationale a en effet déjà été confrontée à des épisodes de crise, qui étaient principalement dus à deux phénomènes. D’une part, la croissance de la démographie scolaire et, d’autre part, l’élévation continue du niveau de recrutement des enseignants, qui a régulièrement provoqué des problèmes assez massifs de recrutement.

    La crise actuelle est différente. La baisse des candidatures s’inscrit dans un temps long, elle est généralisée – avec d’importantes nuances, certes – à tous les concours, et elle est déconnectée des deux facteurs que je viens d’évoquer. Elle est également déconnectée de la situation économique, et ne s’explique pas non plus par les évolutions du nombre de postes offerts au concours, auquel les effectifs de candidats se sont longtemps ajustés.

    On peut désormais sans conteste parler d’une crise structurelle, et on n’entrevoit pas de perspective de résolution mécanique puisque le vieillissement de la population enseignante va entraîner des départs à la retraite massifs dans les prochaines années, alors même que les viviers universitaires se tarissent dans plusieurs filières menant à l’enseignement.

    L’éducation nationale connaît également une hausse des démissions. A quel point ce phénomène est-il inquiétant ?

    La « fidélisation » des enseignants est un problème relativement nouveau pour l’éducation nationale. Rapportées aux effectifs totaux d’enseignants, les démissions sont marginales, mais rapportées au nombre d’enseignants qui quittent chaque année l’éducation nationale, elles dessinent un phénomène beaucoup plus préoccupant : elles représentent 15 % des départs annuels, contre à peine 2 % il y a dix ans. Et elles ne sont plus l’apanage, comme cela a longtemps été le cas, des stagiaires : l’augmentation des démissions est désormais portée par des enseignants de plus de cinq ans d’ancienneté, qui constituent 60 % des démissionnaires.

    Vous parlez d’un effet « boule de neige » de la perte d’attractivité…

    En dégradant les conditions de travail de ceux qui restent, la pénurie engendre la pénurie. Par exemple, les difficultés de recrutement rigidifient le mouvement des enseignants et se traduisent par des difficultés de plus en plus importantes à obtenir une mutation.

    C’est une dégradation manifeste de la qualité de leur emploi, vécue par les professeurs mais également perçue par les étudiants que nous avons interrogés, qui craignent d’être maintenus dans les territoires en tension. Cela affecte directement l’image du métier et donc la capacité à recruter.

    Quels sont les ressorts de cette perte d’attractivité, alors même que les enseignants affirment massivement qu’ils aiment leur métier ?

    Les enseignants adorent leur métier, 92 % d’entre eux disent ne pas regretter leur choix. Mais ce qu’ils veulent avant tout, c’est avoir les moyens de bien le faire. Or, ils ont de moins en moins l’impression de pouvoir remplir leur mission auprès des élèves en raison de la dégradation perçue des conditions de travail et d’un manque de moyens.

    Notre enquête montre également à quel point les relations dégradées avec leur hiérarchie administrative, le manque de reconnaissance ou encore la succession des réformes, qui ressort très nettement dans notre enquête comme un motif de découragement, alimentent leur malaise. Tout cela nourrit un profond sentiment de perte de sens qui pèse lourdement sur la profession.

    Bien que les enseignants aient une meilleure image qu’ils ne le pensent, ce sentiment de détérioration des conditions d’exercice est bien perçu à l’extérieur. On voit le métier comme « sacrificiel », qu’on estime, mais qu’on ne veut pas forcément exercer.

    L’enjeu des rémunérations est aussi souvent évoqué par les enseignants. Les hausses de salaire décidées depuis 2022 n’ont-elles eu aucun effet ?

    Le taux d’insatisfaction salariale reste singulièrement élevé. La rémunération s’apprécie au regard de l’engagement demandé, du niveau de qualification et de la comparaison avec d’autres métiers que l’on aurait pu exercer.

    Or, quand les enseignants se comparent à leurs homologues d’autres pays ou aux autres fonctionnaires de catégorie A, ce qu’ils sont eux-mêmes, ils sont perdants, et même de plus en plus perdants. Le métier n’a jamais été bien payé, mais ce sacrifice salarial a longtemps été compensé par une série d’avantages. Cet équilibre-là paraît rompu.

    Les mesures de revalorisation sont connues par les enseignants, mais elles n’ont pas changé l’image d’un métier mal payé. Dans notre enquête, quand on demande aux gens, notamment aux étudiants, combien sont payés les enseignants en début de carrière, ils répondent « autour du smic », « 1 500-1 600 euros ». Le fait que le salaire d’entrée des titulaires soit désormais à 2 100 euros n’est pas intégré.

    Le gouvernement a engagé une réforme de la formation initiale et en fait un levier majeur pour améliorer l’attractivité. Cela vous paraît-il suffisant au regard de l’enjeu ?

    Le renforcement de la formation initiale est une bonne chose, la question de la place du concours dans le cursus des étudiants est une dimension importante, mais il faut réfléchir plus largement à reconstituer les viviers universitaires : dans certaines filières, le nombre d’étudiants est réduit bien avant la licence 3. Et il nous semble important d’avoir une stratégie globale et d’agir simultanément sur l’ensemble des leviers : reconnaissance, rémunération, mutations, conditions de travail, image du métier…

    Cette crise ne se résorbera pas d’elle-même. Il faut restaurer l’équilibre entre le sens du métier, la reconnaissance de celui-ci, et les conditions d’exercice, si on veut avoir non seulement suffisamment d’enseignants quantitativement, mais aussi suffisamment d’enseignants bien formés qui se projettent durablement dans ce métier.

  • Same as what the others said: in France, non-French EU citizens can vote for EU parliament and municipal elections (electing a mayor). However, you need French citizenship in order to vote for your parliamentary representative (which could be misunderstood as "local" as it is on a district level), and for presidential elections.

    I'm actually curious to know why local elections specifically, if it's an EU directive or just "common" ?

  • According to Yuka (a food and cosmetics rating system), most brands listed in the OP image do not have a good rating. There are two moderate risk ingredients : Sodium Laurel Sulfate (listed as an irritant and an allergen, present in Botot, some Colgate products,, OralB, some sensodyne products and some paradontax products) and Titanium dioxide (listed as potential carcinogen, present in some paradontax and some oral-B, I think it's for teeth whitening). Having a "Moderate risk" ingredient means your score cannot be better than "Poor".

    The app also lists other potential allergens that are "Low risk" and present in most most products across brands (there are sometimes differences within the same brand). If a product only has low risk ingredients, its rating is usually "Good" or "Excellent".

    I couldn't find exactly the pictured product, but this danish brand has an "Excellent" rating on all of its products, not a full score because it includes some of the Low Risk allergens. The best rated products are actually from Elmex.

    Of course this is just one arbitrary rating system, but it's quite transparent and you can get all the details for risk for each ingredient, backed by scientific literature. Also the app is free if you want to scan barcodes :)

  • Si le site dédié c'est Europresse, alors il existe l'extension Ophirofox sur Firefox/Chrome qui simplifie beaucoup le processus (un bouton apparaît directement sur le site de presse et on a presque l'article en un clic). Et la bonne nouvelle, c'est que ça marche du tonnerre avec Firefox mobile (cf le nouveau bouton "Lire sur Europresse"):

    Tout est sur https://ophirofox.ophir.dev/, notamment l'installation sur mobile.

  • Le RN réhabilite Jean-Marie Le Pen sans faire de vagues

    Clément Guillou

    Les dirigeants du RN, qui craignaient une possible « rediabolisation » du parti à la mort de son fondateur, ont salué son parcours sans nuance, encouragés par un discours médiatique et politique très mesuré.

    Il l’avait anticipée, visualisée, commentée depuis des années. Jean-Marie Le Pen n’avait rien à craindre de sa propre mort, survenue le 7 janvier. Ses successeurs davantage. Ils ignoraient sincèrement quelle en serait la réception par les Français, la presse, la classe politique, et les possibles retombées politiques. Les chausse-trappes étaient innombrables. Elles semblent, pour le Rassemblement national (RN), avoir été évitées. A bien des égards, la séquence offre une perspective paradoxale : la famille Le Pen a pu gagner en humanité, longtemps son point faible dans les enquêtes d’opinion, au moment même où elle saluait l’œuvre de son représentant le plus détesté et communiait avec les franges radicales de l’extrême droite.

    Le mouvement de Marine Le Pen pouvait craindre la division dans ses rangs, entre les cadres et députés ayant adhéré par fascination pour Jean-Marie Le Pen et ceux qui ne l’ont rejoint qu’après son exclusion du parti par sa fille. Comme en octobre 2023, lorsqu’une députée RN avait qualifié le cofondateur d’antisémite, après que Jordan Bardella avait dit l’inverse. Cette fois, le respect dû aux morts a autorisé tous les élus, quelle que soit leur sensibilité, à ne retenir que la part de son héritage la plus appréciable à leurs yeux.

    « S’il y a une dissolution en juillet, les adversaires du RN pourront leur reprocher cette solidarité avec Jean-Marie Le Pen. Mais dans deux ans, le temps aura fait son œuvre, estime Nicolas Lebourg, historien spécialiste du Front national. Reconnaître les excès et les polémiques, c’était aussi s’inscrire dans le camp de ceux qui ont osé. » Pour Jean-Yves Camus, directeur de l’Observatoire des radicalités politiques, « tous ceux qui pensaient que le moment de la mort de Jean-Marie Le Pen allait constituer un moment de rupture connaissent mal la psychologie de cette famille politique, où la repentance n’est pas la norme. »

    Les croix celtiques évitées

    Le déroulement des deux cérémonies d’hommage au défunt, l’une dans son fief de La Trinité-sur-Mer (Morbihan), samedi 11 janvier, l’autre à Notre-Dame du Val-de-Grâce (Paris), cinq jours plus tard, était également craint par le parti. Moments de communion de la famille, ils sont aussi éminemment politiques. Dans le village breton, la cérémonie annoncée « dans la plus stricte intimité » a vu des employés de e-Politic, le prestataire de communication du Rassemblement national, filmer la lente marche de la famille Le Pen vers l’église, comme l’a révélé Libération. Un fascicule revisitant sélectivement l’œuvre politique du défunt était distribué. Plus que tolérées, les chaînes d’information en continu ont pu documenter de près l’émotion familiale.

    A Paris, toutes les familles de l’extrême droite française étaient attendues, et craintes par Marine Le Pen. Un important dispositif policier aux abords de l’église, notamment, a permis d’éviter croix celtiques, saluts nazis ou folklore néofasciste, mais pas la présence de nombre d’antisémites patentés. En sortant de l’église, Marine Le Pen a serré quelques mains et arboré un léger sourire qu’elle n’avait plus esquissé depuis la mort de son père.

    Dans une interview au magazine de Vincent Bolloré JDNews, convenue avant sa disparition, elle fait une confession d’une ambiguïté absolue, au sujet de l’exclusion de son père en 2015, après la réitération de ses propos négationnistes : « Je me poserai toujours la question : “Est-ce que j’aurais pu faire autrement ?” (…) Je ne me pardonnerai jamais cette décision, parce que je sais que cela lui a causé une immense douleur. » Cette décision est pourtant un marqueur de la vie politique de Marine Le Pen, censé acter son intolérance au révisionnisme et à l’antisémitisme de son père.

    Est-ce le regret d’une fille ou de la dirigeante politique ? Son entourage défend la première option, mais les nostalgiques du père seront libres d’y voir une réhabilitation. D’autant plus que le parti, où rien ne se fait sans elle, se prête largement à cette entreprise de ripolinage du profil de son cofondateur.

    Des unes avantageuses

    Cette forme de réhabilitation a été accompagnée par les efforts des médias du groupe Bolloré, honorant la mémoire d’un homme décrit comme visionnaire. La nécrologie du Figaro décrit « un briseur de tabous » et renvoie les qualificatifs de racisme ou d’antisémitisme aux accusations de « détracteurs », tandis que le tribun d’extrême droite a collectionné les unes avantageuses du Figaro Magazine et de Paris Match. Les dirigeants de gauche n’ont pas, pour la plupart, tenté d’exploiter politiquement le décès du Breton et l’Elysée a refusé de qualifier son héritage politique, relevant, selon la présidence, « du jugement de l’Histoire ». Le premier ministre, François Bayrou, a vu en lui « un combattant » simplement lesté de « polémiques ». Quant à Eric Ciotti, éphémère dirigeant du parti gaulliste Les Républicains, il a assisté aux obsèques de celui qui avait inscrit l’antigaullisme dans son ADN politique.

    Les scènes de joie sur la place de la République à Paris, rassemblant quelques centaines de personnes, ont été abondamment commentées et décriées. « Une doudoune léopard qui boit du champagne pour fêter la mort de Le Pen, si l’on est cynique, ce sont plutôt de bonnes images pour nous », glisse le député lepéniste Jean-Philippe Tanguy. « J’étais très pessimiste mais le monde politique s’est bien comporté, la couverture était beaucoup plus humaine que prévu, même à gauche », prolonge le président délégué du groupe RN à l’Assemblée nationale.

    Historien spécialiste de l’extrême droite, Jean-Yves Camus voit dans la séquence écoulée un aveu, par la classe politique, que « l’argument moral ne fonctionne pas contre le RN. Depuis le 7 janvier, tout le monde a rappelé l’irrésistible ascension du FN entamée par Jean-Marie Le Pen. Mais personne n’a trouvé la clé pour qu’elle s’arrête ».

  • Le droit de retrait a notamment été considéré comme justifié pour un salarié chargé de conduire un camion de chantier dont les freins étaient défectueux, ou bien, dans une autre affaire, pour un salarié chargé de nettoyer des voitures dans un atelier où la température avoisinait les 3 °C.

    Le danger doit toutefois présenter un certain degré de gravité. A titre d’exemple, le salarié qui quitte son bureau sans autorisation et s'installe dans un autre local au motif que les courants d'air dont il se plaint présentent un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé ne justifie pas son droit de retrait.

    CA Douai 20 avril 2012 N° 11/01756 (salarié chargé de nettoyer des voitures dans un atelier dont la température tournait autour de 3 °C : retrait justifié).

    https://www.inrs.fr/publications/juridique/focus-juridiques/focus-droit-retrait.html

    Entre 7°C et 12°C pour un emploi pas physique/où on est statique (contrairement au nettoyage de voiture), ça ne semble pas délirant du tout ? Si c'était le courant d'air, là j'aurais été d'accord :)

    De plus, le premier paragraphe de cette page mentionne les locaux non chauffé... et les risques d'agression ! Evidemment, tout dépend du contexte et du cas particulier. Je n'ai aucune idée de ce qu'aurait été le jugement dans ce cas, mais ça n'a pas l'air d'être un abus évident. Je ne vois pas non plus pourquoi ça serait prémédité.

    Matériel non conforme, locaux non chauffés, absence d’équipements de protection collective ou individuelle, risque d’agression, sont autant de situations susceptibles de justifier le droit de retrait des salariés.

    Ce qui est criticable je pense (et mentionné par le vice-président de la région), c'est le fait d'avoir vérifié seulement le matin même si le chauffage marchait.

  • I also think this bias was probably taken into account if it exists, I'm more interested in how they translated "drunk" in other languages (or if they used more precise phrasing). I feel like the translation could be perceived as a weaker or stronger level of intoxication than what is meant in English by drunk.

    However, the wording of the article makes it feel like this is not the only study reporting similar results, so that's a good sign (well, or bad..).

  • Intéressant ! Je ne l'aurais jamais « juré mordicus » mais j'ai l'image des vieux iPhones qui affichaient "Emergency calls only" qui induit un peu en erreur, je ne savais pas que c'était grâce à la couverture mobile de la concurrence.

    Par contre je pensais que des appels d'urgence avec SIM mais sans réseau (au sol) c'était possible par satellite, comme ce qui se fait (au grand dam du porte-monnaie :p) en mer ?

  • Pris de panique, les constructeurs automobiles demandent à l'Europe de différer le durcissement des normes CO₂

    Par Virginie Malingre (Bruxelles, bureau européen) et Sophie Fay

    C'est une note blanche qui circule dans les cabinets ministériels et les instances européennes. En jargon européen, on appelle cela un « non paper ». Elle n'est pas signée, mais elle émane d'un grand constructeur automobile, dont le directeur général préside aussi l'Association des constructeurs européens d'automobiles à Bruxelles (ACEA). Tout le monde aura reconnu Renault et Luca de Meo, même si l'entreprise ne fait aucun commentaire.

    Ce document plaide pour l'utilisation d'une disposition méconnue, l'article 122.1 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), une sorte de « 49.3 européen », qui permettrait de différer dans l'urgence l'application d'une réglementation, en court-circuitant le Parlement de Strasbourg.

    L'objectif de ce document, que Le Monde a pu lire, est de reporter de 2025 à 2027 le durcissement de la norme dite CAFE (Corporate Average Fuel Economy) portant sur les émissions de dioxyde de carbone. A compter de 2025, le seuil moyen autorisé par véhicule diminuera de 15 %, pour atteindre un maximum situé entre 90 grammes et 95 grammes de CO2 par kilomètre (un chiffre qui varie selon les calculs et les marques). Un constructeur automobile qui dépasserait la limite serait redevable d'une amende de 95 euros par gramme excédentaire pour chaque voiture vendue. Compte tenu des ventes actuelles sur le marché européen, en 2025, la note de Renault estime que « les pénalités pourraient atteindre 13 milliards d'euros pour les voitures particulières et 3 milliards pour les véhicules utilitaires ».

    Un véhicule thermique très performant, rappelle la note, émet actuellement en moyenne 120 grammes de CO2 par kilomètre. Pour respecter la norme CAFE, un constructeur devra donc vendre une « watture » (100 % électrique) pour quatre thermiques. Or, le marché européen de l'électrique « stagne depuis plus d'un an à moins de 15 % pour les voitures particulières et à 7 % pour les utilitaires », précise le document. Ce qui rend l'objectif impossible à atteindre.

    Trois solutions pour éviter l'amende

    Les constructeurs, pour éviter l'amende, ont trois solutions. La première, prévient la note, serait dramatique pour l'emploi. Il s'agit de réduire la production de véhicules thermiques de plus de deux millions d'unités et celle de camionnettes de 700 000 unités, « soit l'équivalent de plus de huit usines européennes ».

    La deuxième consiste à s'entendre avec des constructeurs américain ou chinois (Tesla, Volvo, filiale de Geely, ou MG par exemple) pour leur racheter des crédits-carbone. Mais ce « pooling » revient à subventionner des concurrents, au moment où l'Europe essaie d'instaurer des droits de douane pour les freiner. « Dans tous les cas, détaille la note, vu la part de marché actuelle des véhicules électriques en Europe, le “pooling” ne suffirait pas »à éviter les amendes.

    La troisième piste serait que les Etats augmentent les subventions à l'achat de véhicules électriques, mais ils font l'inverse, ou encore que les constructeurs baissent les prix pour atteindre une part de marché de 22 % des véhicules électriques. Mais précise la note, « la Commission a montré que l'industrie du véhicule électrique européenne n'était pas rentable », au cours de son enquête sur les aides d'Etat chinoises.

    C'est « l'urgence extrême de la situation »qui justifierait, selon cette note, le recours à l'article 122.1 du TFUE. Celui-ci dispose que : « sans préjudice des autres procédures prévues par les traités, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut décider, dans un esprit de solidarité entre les Etats membres, des mesures appropriées à la situation économique, en particulier si de graves difficultés surviennent dans l'approvisionnement en certains produits, notamment dans le domaine de l'énergie ». Cette disposition permet aux Etats membres de prendre une décision à la majorité qualifiée, sans que le Parlement européen y soit associé.

    Renault fait campagne

    Depuis quinze jours, Renault fait campagne pour diffuser son idée. A la Commission, la proposition d'utiliser l'article 122.1 « fait doucement rigoler », commente une source européenne. Cet article est honni par le Parlement européen et son utilisation est strictement encadrée. Les Vingt-Sept y ont eu recours à plusieurs reprises lors de la crise due au Covid-19 ou après le début de la guerre en Ukraine pour l'achat en commun de vaccins, pour aider les gouvernements à financer le chômage partiel durant la pandémie, pour créer un prélèvement sur les superprofits des producteurs d'énergie ou encore pour plafonner le prix du gaz.

    « Je ne pense pas qu'activer un article de crise massive soit le bon outil pour traiter un éventuel problème sectoriel », commente l'eurodéputé (Renaissance) Pascal Canfin. En revenant, même temporairement, sur une disposition qu'il a votée, la Commission et les Etats prendraient le risque d'indisposer le Parlement européen. Or, à compter du 17 septembre, il doit valider le choix des nouveaux commissaires.

    La proposition d'action a néanmoins été présentée par le président aux membres de l'ACEA mercredi 11 septembre, qui ne l'auraient pas rejetée, car elle semble être aujourd'hui la seule voie pour modifier un règlement européen en moins de quatre mois. Le rapport de Mario Draghi sur la compétitivité de l'Europe, remis le 9 septembre à la Commission, fait d'ailleurs référence à la souplesse que peut apporter l'article 122.1.

    Jeudi, l'Association des constructeurs européens d'automobiles a rappelé dans un communiqué « ses inquiétudes sur sa capacité à atteindre les objectifs 2025 d'émissions de CO2 »dans un contexte de « stagnation de la part de marché des voitures électriques à batterie, une tendance continue ». Philippe Houchois, analyste financier chez Jefferies, estime l'amende potentielle pour Volkswagen (26 % de part de marché en Europe) entre 2,6 milliards et 7,3 milliards d'euros (avant « pooling »). Selon M. Houchois, pour éviter l'amende, Renault devrait multiplier par deux la part des voitures électriques dans ses ventes, ce qui semble difficile.

    Démarche irrecevable

    Stellantis, qui n'est plus membre de l'ACEA depuis 2022, s'en sortirait mieux, grâce à son offre de petites voitures électriques et son alliance avec le chinois Leapmotor. A partir de 2025, la norme favorisera en effet les voitures légères alors que les calculs jusqu'à présent avantageaient les véhicules les plus lourds.

    « Je ne sais pas si c'est un problème systémique pour tous les constructeurs ou un problème qui concerne essentiellement Renault et Volkswagen. Il faut lever cette incertitude avant de regarder le dossier » , poursuit Pascal Canfin.

    Pour Marie Chéron, responsable des politiques véhicules au sein de l'ONG Transport et environnement France, systémique ou pas, la démarche est irrecevable. « Elle est absurde, explique-t-elle. Les constructeurs ont réalisé plus de 130 milliards d'euros de bénéfices depuis 2022 et ont eu des années, depuis 2019, pour se préparer à l'objectif. Maintenant, ils tentent de déclencher l'état d'urgence pour pouvoir continuer à vendre des voitures polluantes. »

    Thierry Breton, le commissaire à l'industrie que la France voudrait voir rester à Bruxelles, juge, pour sa part, l'industrie automobile mal en point et martèle qu'il faut lui laisser plus de temps pour se convertir à l'électrique, alors que les Européens ont décidé d'interdire la vente de nouvelles voitures roulant à moteur thermique à compter de 2035. « Pour atteindre cet objectif, le chemin se trouve plus ardu qu'envisagé initialement. Et les projets d'usines à batterie n'avancent pas aussi vite qu'attendu », déclare-t-il au Monde. Avant de poursuivre : « Dans ce contexte, pénaliser l'industrie à court terme, c'est affaiblir sa compétitivité à moyen et long terme, qui est pourtant essentielle pour atteindre notre objectif commun pour 2035. »

    Pour lui, « toutes les options constructives doivent être considérées ». Pour autant, le commissaire se méfie du recours à l'article 122.1, qui pourrait lui revenir en boomerang lors de son audition pour sa reconduction par les eurodéputés.